La Maison des regards

La Maison des regards

Daniele Mencarelli

Roman autobiographique, La maison des regards est écrit à la première personne. Daniele, poète, la vingtaine passée, vit chez ses parents. Angoissé, en pleine dépression et alcoolique, il pèse sur sa famille, écorchée par son état et impuissante à l’aider. Dans un sursaut pourtant, Daniele appelle à l’aide, et cette aide prend la forme d’un poste d’homme de ménage. Son emploi est situé à Rome au sein de l’hôpital de l’Enfant-Jésus, le plus grand hôpital pédiatrique d’Europe. Il est intégré au sein d’une équipe, dont nous rencontrons les membres, personnages eux-même plus ou moins abîmés par la vie, comme l’attachant Giovanni. Au sein de cette entreprise en charge du ménage, on retrouve les microdrames de la vie professionnelle : la coopération entre collègues y est aussi forte que la compétition, l’entraide et l’affection aussi puissantes que les haines. En filigrane, sans description grandiloquente, sont évoquées les innombrables vies qui transitent par cet hôpital, enfants malades, parents brisés. Et puis il y a Toc-Toc, un garçon hospitalisé avec lequel Daniele noue une relation épisodique à travers la vitre d’une fenêtre. Ces rencontres sont bouleversantes, et contre toute attente participent au chemin de guérison, non sans violence, du narrateur.

Contrairement à son alter ego littéraire, l’auteur est très sobre, il décrit posément son état, le cercle de la souffrance lié à ce qu’il impose à ses proches, son incapacité à s’intégrer socialement, sa lutte contre l’alcool. Il ne prétend donner nulle recette miracle quant à la dépression ou la maladie, mais relate magnifiquement sa propre expérience en l’intégrant dans ce portrait délicat d’un petit bout de la société italienne. La traduction (N.BAuer) est impeccable, comme toujours chez Globe. Un roman que j’ai refermé avec enthousiasme (et une petite larme) en dépit des thèmes graves et profondément tristes qui le traversent. 

Ed. Globe, 23,00€

 

extrait

Il y a entre mes collègues et moi un énorme fossé, que seuls l’affection que j’ai éprouvée d’instinct à leur égard et le travail accompli ensemble parviennent à combler. Nos différences résident dans les rêves que nous avons nourris, les choix que nous avons effectués, les lieux où le destin nous a fait naître; les ignorer serait dangereux pour moi comme pour eux. Avant que l’alcool ne prenne le dessus, je rêvais de devenir poète.